La communication non violente : peut-on tout résoudre par le dialogue ?

« Le vrai démocrate est celui qui, par des moyens non violents, défend sa liberté, par conséquent celle de son pays, et finalement celle de l’humanité tout entière », Gandhi.

Si l’homme politique et philosophe pacifiste est cité en introduction de l’article du jour, c’est en réalité pour une raison bien précise.

C’est en effet à partir de la théorisation de la non-violence de ce dernier et des travaux du docteur Carl Rogers (psychologue humaniste américain décédé en 1987) que le docteur Marshall Rosenberg (lui aussi psychologue américain et élève de Rogers) a pu mettre en évidence un processus d’échanges qu’il appelle la communication non violente.

Son idée ? Placer l’empathie au centre de toute discussion, développer l’interaction sans nuire à l’autre et faire de la résolution des conflits un mécanisme s’appuyant sur la négociation et la compréhension mutuelle.

Plusieurs piliers sous-tendent la formulation concrète de la communication non violente.

Selon Marshall, l’individu pourrait alors renforcer ses capacités relationnelles et faire de la joie de vivre et du bonheur des valeurs transmissibles, tout en répondant à trois de ses besoins prépondérants :

  • La libération face aux jugements extérieurs et aux influences environnementales.
  • La compréhension de ses ressentis.
  • La volonté d’évoluer dans le respect mutuel.

Dans les faits, la communication non violente serait un vaste ensemble comprenant un langage spécifique (basé sur la courtoisie et le savoir-vivre), une manière de penser et un certain savoir-faire communicationnel.

Mais qu’en est-il à notre échelle ?

Peut-on véritablement adopter la communication non violente en société ?

Existe-t-il des moyens simples de la mettre en exergue ?

C’est ce questionnement qui servira de terrain à l’expression de notre réflexion.

1. Quand le respect permet de faire passer ses idées

Violence, disputes, conflits, véhémence… sont des mécanismes quasiment incontournables dans la vie d’un individu.

Dans un environnement où l’image, le paraître, la nécessité de ne pas sortir du rang et la course aux premières places dominent largement tout autre axe de vie, il paraît impossible de ne pas se voir un jour confronté à des situations tendues où politesse et respect sont littéralement absents.

Il n’est pas ici question de juger ce genre de dispositions, qui restent naturelles et explicables, selon les événements et leur impact sur l’individu (notamment lorsqu’on est victime d’une attaque caractérisée).

Cependant, il est clair qu’une réflexion quant à la portée de tels comportements peut mettre en exergue les bienfaits de la communication non violente.

Entrer dans une colère noire n’est jamais quelque chose de bénéfique en ce que cela provoque une évidente perte d’objectivité et de repères.

N’est-ce pas sous le coup de l’énervement que l’on peut agir sans se soucier des conséquences ?

N’avez-vous jamais insulté quelqu’un ou cassé un objet par simple nécessité d’expulser cette rage qui bouillait en vous, d’extérioriser votre ressenti ?

La volonté de nuire n’est pas selon moi un désir qui anime l’Homme.

Il se peut que l’individu perde pied et sombre doucement dans l’isolement, exprimant de manière violente son incompréhension envers un système qui ne lui convient plus.

Bien loin de moi l’idée de justifier des comportements dangereux ou portant atteinte à autrui, j’essaye simplement d’implémenter l’idée qu’un raisonnement sur les effets de la colère peut engendrer une réelle prise de conscience sur les dispositions à adopter pour être en phase avec son milieu.

Après tout, un conflit n’est guère autre chose que l’expression simultanée de désirs antagonistes.

Pourquoi alors ne pas se pencher sur l’axe de l’harmonie et de la réciprocité ?

Pourquoi faire de l’agressivité un principe redondant utilisé quasi systématiquement lorsqu’une opposition est mise à jour ?

Ce sont ces questions qui peuvent nous permettre de comprendre pourquoi la communication non violente devrait être une valeur commune, partagée par un environnement tout entier.

Bien évidemment, voilà qui se heurte à une réalité de terrain, qui ne permet pas toujours de formuler des explications rationnelles et respectueuses.

Qui resterait aimable après avoir été victime d’un accident de la route alors qu’il était dans son bon droit ?

Quel chef d’entreprise s’adresserait sereinement à un employé venant de lui faire perdre une grosse somme d’argent ?

Quel être humain resterait de glace en apprenant que son/sa partenaire l’a trompé(e) avec quelqu’un d’autre ?

C’est donc avec une certaine distance qu’il faut appréhender la notion de communication non violente.

Elle peut être adoptée, mais nécessite une réelle introspection.

Et ne nous leurrons pas, elle sera difficile à entretenir de façon perpétuelle.

2. Le paradoxe de l’analyse subjective

Pour faire de la communication non violente, cette capacité à écouter et à comprendre l’autre afin de transiger objectivement, une réalité quotidienne, l’introspection est sans doute la clé.

Le paradoxe de la manœuvre, c’est bien entendu le fait que pour améliorer ses capacités relationnelles, l’individu doive en priorité réfléchir sur ses propres déviances et ses ressentis avant même de considérer les enjeux de toute interaction.

Il apparaît en effet qu’en cherchant les moyens les plus appropriés pour afficher sa confiance en soi, qu’en prenant conscience de ses propres besoins et en s’autorisant à être tolérant avec lui-même, ce dernier puisse plus facilement transposer ce raisonnement à autrui.

Ainsi, nous nous accorderons tous à dire que pour entretenir une atmosphère relationnelle saine, nous avons besoin de nous sentir respectés, écoutés et pris en considération par nos interlocuteurs.

La réciproque est bien évidemment vraie.

De plus, une aptitude à véritablement accorder du crédit à l’autre permet de favoriser la connaissance de soi, en ce que les argumentaires qui nous sont opposés peuvent finir par nous faire ouvrir les yeux : non, personne ne possède la science infuse ou ne peut se targuer de toujours avoir raison.

Un argument propose toujours deux faces : celle qui semble abonder dans le sens de son émetteur, et celle, parfois plus difficile à admettre, qui fait état de vérités objectives (bien que ces dernières restent discutables).

Accorder le droit de parole à autrui, sans faire preuve de négativité, c’est aussi s’autoriser à comprendre comment notre environnement évolue et la profondeur de la psychologie humaine.

Concrètement, c’est en cherchant en quoi le fait d’évoluer dans l’aigreur et de voir le mal partout l’influence dans son quotidien, que l’être humain peut comprendre la nécessité de faire des efforts lors des interactions qu’il développe.

Il est certain qu’une personne toujours de mauvaise humeur, se contentant de se focaliser sur ses propres problèmes et excluant autrui de leur résolution ne pourra être considérée comme une personne sociable, agréable à côtoyer.

La voilà donc la priorité : analyser nos propres déboires, les obstacles qui nous font face et leurs conséquences sur notre comportement, pour essayer justement d’adapter notre communication et de faire preuve d’empathie.

Un excellent moyen de trouver du soutien dans les moments difficiles, qui plus est !

La communication non violente, c’est donc avant tout une capacité à définir ses propres faiblesses, afin de ne pas les laisser empiéter sur notre sphère relationnelle.

3. La pratique de la communication non violente au quotidien ?

Si la communication non violente reste idéaliste, presque utopique (car impossible à adopter dans son entièreté), elle repose sur une logique matérielle, décrite par le docteur Marshall Rosenberg.

Selon lui, elle se décompose en 3 étapes bien distinctes :

L’analyse situationnelle

Toute situation doit d’être observée, étudiée, sans pour autant émettre de jugement.

Nous savons en effet que chaque individu a ses forces et ses faiblesses, et nous ne saurions pas forcement plus aptes à résoudre un même problème dans une situation identique.

L’expression du ressenti

Lors d’un échange, chacun des intervenants doit pouvoir exprimer librement son point de vue, ses sentiments et son état d’esprit.

Cela limite le non-dit et les conflits rampants.

Cette manœuvre peut aussi être à l’origine d’une prise de conscience, en ce qu’un retour sur l’impact de nos dires peut ainsi nous être formulé.

L’expression des besoins

Une interaction s’inscrit par définition dans le cadre d’une coopération.

Elle répond à un besoin clair, que ce dernier soit de grande importance ou non.

Besoin de se confier, d’être épaulé, demande matérielle, demande d’implication personnelle… les motifs sont aussi divers que variés, mais les exprimer permet de donner un véritable cadre à l’échange et de mieux en cerner les enjeux.

L’adoption de la communication non violente serait alors un phénomène permettant de s’éloigner du réflexe encore trop commun de la méfiance au profit d’une véritable intériorisation et d’une écoute de son ressenti.

De quoi favoriser la connaissance de soi et détendre l’atmosphère !


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